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Le FCC (Front commun pour le Congo) n’a pas attendu 24 heures pour répondre au président de la République, après son message à la nation du dimanche 6 décembre 2020. Sans ménagement et sans beaucoup d’égards, la plateforme de l’ancien président, Joseph Kabila, qui dit ne pas se sentir concernée par les « annonces inconstitutionnelles » du chef de l’État, les rejette en bloc. Pire que cela, le FCC appelle le CACH à tirer toutes les conséquences en se retirant de la coalition. S’il faut trouver un jargon politique, celui-ci s’appelle simplement « déclaration de guerre »

La plateforme politique dirigée par Joseph Kabila est sortie de son silence après le discours du chef de l’État, Félix Tshisekedi. Dans une déclaration politique faite hier lundi 7 décembre 2020, le FCC a appelé son ancien partenaire, le CACH (Cap pour le changement) à tirer toutes les conséquences, en se retirant de la coalition.

« Il revient au CACH de tirer toutes les conséquences de la décision de mettre fin à la coalition, annoncée par son autorité morale en se retirant du gouvernement central, et des gouvernements provinciaux auxquels il participe. Ce qui entraîne, la cohabitation », peut-on lire dans ladite déclaration lue par l'influent coordonnateur du FCC), Néhémie Mwilanya Wilondja.

Et d’ajouter : « Les conclusions unilatérales du Président de la République violent gravement la Constitution et servent de prétexte pour liquider par l’instauration d’un régime dictatorial au service d’un pouvoir personnel, les institutions établies à terme des élections ».

Quant à la question de la dissolution de l’Assemblée nationale, le FCC dit que les conditions pour dissoudre la Chambre basse du Parlement ne sont pas encore réunies. Pour la plateforme politique de Joseph Kabila, la désignation d’un informateur, là où existe un gouvernement de plein exercice, soutenu par une majorité confortable, est une violation flagrante et intentionnelle de la Constitution.

Rappelons que, dans son discours du dimanche 6 décembre 2020, le président de République, Félix Tshisekedi a annoncé qu’il nommera un informateur pour identifier la nouvelle majorité à l’Assemblée nationale. Ainsi, cette décision met un terme à la coalition entre le FCC-CACH.

Pour Félix Tshisekedi, le gouvernement issu de cette coalition n’a pas permis de mettre en œuvre le programme pour lequel le peuple l’a porté à la magistrature suprême. En d’autres termes, ce gouvernement n’a pas répondu aux attentes du peuple congolais.

Le Potentiel

(Ci-après l’intégralité de la Déclaration politique du FCC)

DÉCLARATION POLITIQUE DU FRONT COMMUN POUR LE CONGO, (FCC)

Réunie en Session extraordinaire ce lundi 07 décembre 2020, et après avoir suivi le discours du Chef de l’Etat sur ses consultations initiées le 02 novembre 2020, la Conférence des Présidents des Partis et Regroupements politiques du FCC fixe l’opinion sur ce qui suit :

Quoi que n’ayant pas participé à ces consultations pour des raisons antérieurement exprimées, et en dépit de leur caractère non inclusif, le FCC note que les conclusions unilatérales qu’en tirent le Président de la République violent gravement la Constitution et servent de prétexte pour liquider, par l’instauration d’un régime dictatorial au service d’un pouvoir personnel, les institutions démocratiquement établies aux termes des dernières élections générales du 30 décembre 2018.

En effet :

  1. La désignation d’un informateur là où existe un Gouvernement de plein exercice, soutenu par une majorité confortable, est une violation flagrante et intentionnelle de la Constitution. La Constitution ne reconnait pas au Président de la République la compétence de démettre le Gouvernement.
  2. Le FCC rappelle que dès la Constitution de la coalition constatée par le communiqué conjoint FCC-CACH du 06 mars 2019, il avait une majorité absolue issue des élections, de 338 Députés Nationaux sur les 500 qui composent l’Assemblée Nationale, à laquelle se sont juste greffés 47 Députés du CACH. Depuis lors, cette majorité a été systématiquement confirmée, y compris il y a quelques jours, à l’occasion du vote du budget de l’exercice 2021, présenté par le Gouvernement. Dès lors, nonobstant les multiples actes de corruption avérés à l’endroit des Députés Nationaux, opérés par le CACH, affirmer que cette majorité s’est effritée, est sans fondement et contraire à la Constitution.
  3. Le Gouvernement reste soutenu par une large majorité, qui vient de démontrer à travers le vote du budget de l’exercice 2021, qu’elle est au service du peuple. Il revient plutôt au CACH de tirer toutes les conséquences de la décision de mettre fin à la coalition, annoncée par son Autorité Morale, en se retirant du Gouvernement Central et des Gouvernements provinciaux auxquels il participe. Ce qui entraine d’office la cohabitation.

Cependant, le FCC rappelle que la finalité de l’Accord de coalition signé par l’Autorité Morale du CACH et l’Autorité Morale du FCC, était la paix, la stabilité et le développement du pays.

  1. Justifier le projet prémédité d’une dissolution de l’Assemblée Nationale en dehors de toute crise persistante entre le Gouvernement et l’Assemblée Nationale en prétextant d’une prétendue divergence entre ces deux institutions, autour de la question de la prestation de serment des nouveaux juges nommés illégalement à la Cour Constitutionnelle, avaient le même point de vue sur cette problématique, c’est non seulement falsifier la vérité, mais aussi une tentative de violation grave et intentionnelle de la Constitution.
  2. La menace de dissolution de l’Assemblée Nationale constitue une intimidation qui n’a pas lieu d’être dans une démocratie, étant entendu par ailleurs que les conditions de cette dissolution, pourtant clairement définies dans la Constitution, ne sont pas réunies.

Qu’à cela ne tienne, si le Président de la République estime qu’il y a matière à contestation de légitimité des Députés Nationaux, le FCC rappelle que ces derniers et le Président de la République sont issus des scrutins combinés ; et que cette problématique induirait logiquement l’organisation des élections générales anticipées (présidentielle, législatives nationales, et provinciales).

  1. Le FCC dénonce de la manière la plus ferme, l’usage abusif flagrant des moyens de l’Etat par le CACH (justice, services de sécurité, police, argent de l’Etat), en vue de faciliter la confiscation des libertés publiques et l’exécution d’un coup d’Etat constitutionnel.

Il rappelle que la dispensation politique actuelle est issue des urnes et que les libertés fondamentales d’expression et des mouvements, qui sont constitutionnelles, ont été conquises de haute lutte.

De ce qui précède :

1°. Le FCC prend acte de la décision du Président de la République de mettre fin à la coalition, avec les conséquences qui s’imposent pour le CACH telles qu’évoquées au point 3.

2°. Le FCC ne se sentant nullement concerné par les annonces inconstitutionnelles du Chef de l’Etat, les rejette en bloc. Il assure son ferme soutien au Premier ministre et son Gouvernement, ainsi qu’aux Bureaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat.

3°. Le FCC qui prend à témoin l’opinion tant nationale qu’internationale sur la crise institutionnelle que tente de créer artificiellement le Président de la République et sa famille politique, usera de tous les moyens de droit et politiques pour y faire face et fixera sa conduite à tenir dans les prochaines heures.

4°. Le FCC informe le public qu’il va demander à son Autorité Morale, le Président de la République honoraire, Son Excellence Joseph KABILA KABANGE, de donner sa part de vérité afin d’éclairer l’opinion sur la situation politique du pays ainsi créée par le Président de la République.

5°. Le FCC appelle la population à rester mobilisée contre la tentative en cours de hold-up de sa volonté souverainement exprimée dans les urnes en confiant la majorité parlementaire au FCC.

Fait à Kinshasa, le 7 décembre 2020

Pour la Conférence des Présidents